
Quand faut-il changer les filtres Hépa d’une installation de salle propre ?
Cette question récurrente de nos clients reste souvent sans réponse claire. Il y a de nombreux facteurs à prendre en considération, ce qui rend impossible une réponse unique.
Il faut savoir que 90 % des filtres Hépa changés sont encore en bon état de fonctionnement, tant au niveau de l’étanchéité que de la perte de charge finale recommandée non atteinte.
La durée de vie d’un filtre Hépa peut donc être déterminée :
– Selon une durée de vie fixée arbitrairement,
– En fonction d’une perte de charge maximale à débit constant (ce que toutes les centrales de traitement d’air ne permettent pas),
– Méthode moins courante : selon une consommation énergétique qui le justifierait.
Nous allons tenter d’éclaircir ces points et de fournir une approche objective.
1. Préfiltration
Le premier critère à considérer est la qualité de la préfiltration en amont des filtres Hépa. Plus elle est fine, plus la durée de vie du filtre sera importante.
Par exemple, une installation avec un simple préfiltre Coarse 60 % (anciennement G4) peut être acceptable pour une ambiance intérieure avec un flux laminaire en recyclage total d’air dans un local peu sale. Cette solution n’est cependant pas envisageable pour une centrale de traitement d’air.
Nous conseillons au minimum une préfiltration ePM1 > 50 % (anciennement F7), idéalement > 80 % (anciennement F9).
2. Approches différentes pour déterminer le moment de changer les filtres

A. Durée de vie fixée arbitrairement
Certains fabricants recommandent un remplacement tous les 5 ans, en prétextant que les filtres subissent un effort mécanique constant de l’air sur le média (24/365). Cependant, il n’existe pas, à notre connaissance, d’études validées ou de retours terrain pour justifier cette recommandation.
Cela peut être justifiable dans des zones à risque élevé. La nouvelle directive des BPF préconise un test d’étanchéité (Emery ou autre) tous les 6 mois sur les zones à haut risque (Classe A et B, ISO 5) pour limiter les risques.
Cependant, pour des zones C et D (ISO 7 à ISO 8), changer les filtres tous les 5 ans, si les débits et pertes de charge sont conformes, semble non justifié.
B. Perte de charge maximale fixée
Cette méthode est acceptable si :
– Les tests d’étanchéité sont réguliers et conformes,
– Le débit au filtre reste constant. Sinon, la perte de charge diminue à mesure que le débit baisse.
C. Consommation énergétique
Avec l’augmentation du coût de l’énergie, cette approche devient intéressante. Une consommation excessive rendrait le remplacement du filtre énergétiquement rentable.
Voici un exemple :
- Filtre neuf type ePM1>80% en CTA : perte de charge initiale de 140 Pa.
- Filtre usagé : perte de charge de 280 Pa après 7 ans (en supposant un encrassement annuel de 20 Pa).
- Pour un filtre 610*610*69 mm, un débit de 600 m3/h,
- Un rendement ventilateur de 50%,
- Un temps de fonctionnement d’installation de 8760h/an, et le prix de kilowattheure de 0.19€ comme évoqué.
Coûts énergétiques :
– Filtre neuf : (600*140*8760/ (3600*1000*0.5)) = 408 kWh/an, soit 77 €/an.
– Filtre usagé : (600*280*8760/ (3600*1000*0.5)) = 817 kWh/an, soit 155 €/an.
En prenant en considération l’encrassement du filtre de 20 Pa/an, moyenne relevée sur beaucoup de nos installations, la delta P de 280 Pa pour un filtre neuf de 140 Pa est atteinte en (280-140) /20 : 7 ans.
Si nous regardons cela d’un point de vue économique :
- Le prix de fonctionnement du filtre année après année est le suivant :
- La première année : 408 kWh/an, soit 69,35 €,
- La deuxième année : 467 kWh/an, soit 80 €,
- La troisième année : 525 kWh/an, soit 91 €,
- La quatrième année : 584 kWh/an, soit 102 €,
- La cinquième année : 642 kWh/an, soit 113 €,
- La sixième année : 700 kWh/an, soit 124 €,
- La septième année : 760 kWh/an, soit 135 €,
- La huitième année : 817 kWh/an, soit 147 €,
- La neuvième année : 876 kWh/an, soit 158 €,
- La dixième année : 934 kWh/an, soit 170 €.
Selon le tableau ci-dessous, la perte de charge après 10 ans est encore de 320 Pa, très loin de la perte de charge maximale indiquée par de nombreux fournisseurs (500 Pa) !
En prenant en considération le prix du changement de ce même filtre (fourniture, pose, test d’étanchéité) entre 300 et 500 € selon le type de filtres, la configuration du site, les coûts indirects (mise à blanc, réglages, arrêt de production, évacuation des déchets), ainsi que le prix du kilowattheure (très variable depuis 2 ans d’un site à l’autre, ici fixé à 0,19 €/kWh), il paraît intéressant de changer le filtre entre la huitième et la dixième année. Le coût de l’énergie cumulé sur ces deux années étant de 343 €, le coût du changement de filtre devient alors « énergétiquement » rentable.

Tableau de synthèse de calcul :

Sous forme de graphe :

3. Conclusion
Il n’y a pas une seule vérité. La solution est toujours un compromis entre le risque produit, qu’il soit important ou non, une étude de risques approfondie est souvent nécessaire. Le coût du changement des filtres doit également être pris en considération.
Nous avons opté, de notre côté, pour :
- Les zones à risques majeurs et/ou stériles (Classe A, B, parfois C (équivalent Iso 5 à 7) : un changement de filtres Hépa tous les 5 à 7 ans, cet intervalle de temps étant fixé par le risque produit.
- Les zones à risques moindres (Classes C et D (équivalent Iso 7 à 8) : un changement de filtres tous les 8 à 10 ans, cet intervalle de temps étant fixé par le coût de fonctionnement énergétique du filtre, dont le remplacement devient économiquement rentable au vu du prix de l’énergie.